Rien à voir avec une quelconque visite chez l’orthophoniste et d’éventuelles difficultés d’énonciations, même si c’était le cas, ça ne serait pas le lieu pour en parler. Non, je continue mon exploration des Liaisons dangereuses, œuvre unique à plus d’un titre, mais surtout unique roman de son auteur ayant traversé les siècles.
J’ai été confronté pour la première fois à cette œuvre dans un cadre assez classique finalement, pour un roman classé dans les classiques depuis que certaine institution se l’est inscrite dans ses programmes. Une reconnaissance qui peut avoir son revers mais qui, en l’occurrence, m’aura permis d’ouvrir l’ouvrage et de me plonger dedans avec délectation.
C’était donc il y a bien bien longtemps (j’exagère) dans une galaxie pas si éloignée que ça puisque c’est la nôtre, notre bonne vieille Voie lactée, alors qu’il s’agissait de préparer une échéance importante de ma vie d’élève, une échéance anticipée pour un examen qui marquerait le début de ma vie estudiantine… Il fallait en passer par certaines épreuves, pas sûr que ça ait à voir avec le passage à l’âge adulte, pas vraiment un rite mais presque. Et dans le cadre de cette préparation se déroula la rencontre.
J’avais déjà été confronté au roman épistolaire, une fois, et j’avais goûté cette confrontation avec Les lettres persanes de Montesquieu. Il faudrait que je m’y remette pour voir si l’effet est toujours le même. Mais cette forme de roman n’est plus très en vogue de nos jours.
La découverte ne fut donc pas dans la forme mais dans l’esprit. Je me suis délecté à suivre une intrigue particulièrement tortueuse au travers des échanges entre protagonistes. Ces échanges nous permettent de suivre plusieurs aspects de l’intrigue en parallèle, ils nous permettent de ne pas nous perdre dans des méandres trop confus et permettent surtout à l’auteur de nous donner à voir l’esprit, l’âme des différents personnages. Car les lettres sont l’occasion de confidences et, à cette époque, les confidences pouvaient aller très loin puisque la peur de la diffusion sur Internet, par exemple, n’existait pas… même si, ils auraient un peu dû se méfier ces êtres machiavéliques dont nous suivons les plans de vengeances de missive en missive. Ça pourrait presque faire l’objet d’une étude, d’un pan de l’étude, que proposent les professeurs de français à leurs chères ouailles. Du danger de diffuser les pensées profondes de chacun, de l’intérêt de préserver une sphère privée, très privée. Inaccessible au tout-venant.
La marquise de Merteuil et le vicomte de Valmont sont des personnages intrigants. Ils veulent se venger en utilisant les sentiments quand ils en sont eux-mêmes les jouets. La présidente de Tourvel, Cécile de Volanges ou le chevalier Danceny se laissent manipuler en tentant de résister à leurs penchants. Bien des choses restent inavouables. Mais cette valse des sentiments, l’utilisation et la manipulation des êtres sont savoureux et affolants. Comment se prémunir ?
Laclos nous propose une histoire à la construction particulièrement élaborée et qui, sous des dessous parfaitement moraux, explore des recoins inavouables de nos esprits et des tentations auxquelles il tente parfois de ne pas succomber.
C’est un grand roman, écrit dans une langue classique, riche et qui explore nos âmes comme peu de romans ont osé le faire depuis ou même avant… Certains contemporains ne s’y sont pas trompés, proposant des adaptations cinématographiques de cette intrigue parfois savoureuses sur lesquelles je reviendrai prochainement.